FIBA

Arvydas Sabonis, un bucheron aux doigts de fée

Joueur au gabarit impressionnant pour l’époque, Arvydas Sabonis a révolutionné la vision que l’on peut avoir du basketball aujourd’hui. Du temps où les pivots étaient plus souvent limités dans le jeu, ce grand moustachu a apporté une touche de finesse et d’esthétique dans une ligue de brutes épaisses. Compétiteur et coéquipier en or, Arvydas Sabonis rafle tout durant les premières années de sa carrière en FIBA. Il excelle également en équipe nationale avec l’URSS, qu’il fait champion d’Europe et champion olympique, ainsi que la Lituanie, à laquelle il apporte sa première médaille aux Jeux olympiques de 1992.

La main dominante soviétique sur l’Europe des 90’s

C’est à l’âge de 17 ans qu’Arvydas débute dans le monde professionnel. De 1981 à 1989, le géant de 2,20 m joue pour le Zalgiris Kaunas. Il représente fièrement sa terre natale face à l’ennemi moscovite, le CSKA Moscou — un duel emblématique de la bataille entre l’URSS et les nations satellites. Lors de sa première année, il marque en moyenne 13,2 points par match. Il enchaine les saisons, avec un pic en 1986 à 28,6 points par match. Chaque année de 1985 à 1988, Arvydas est champion d’URSS avec le Zalgiris Kaunas. Grâce à ces victoires, il met un terme au règne du CSKA Moscou, invaincu sur une période de 8 ans entre 1976 et 1984. Avec ces nombreux succès, l’intérieur marque l’histoire du club lituanien. Il quitte le collectif soviétique en 1989 pour rejoindre l’Espagne.

Il signe pour l’équipe de Valladolid, qui est alors un petit club de première division, et les emmène en finale de la coupe des Asturies. Pendant ses 3 années dans cette structure familiale du nord-est de l’Espagne, il affiche une moyenne de 24,5 points par match. Les Espagnols découvrent une arme de destruction massive. En effet, Sabonis brille en attaque avec un jeu composé de mouvements au poste dignes des plus grandes légendes et d’un shoot à mi-distance plus que fiable. En outre, le pivot tire aussi à trois 3 points — un atout révolutionnaire pour un athlète de sa stature. En Europe, lutter semble difficile à partir du moment où l’intérieur lituanien se tient sur ses deux jambes.

Arvydas Sabonis étale sa domination quand il rejoint le grand Real Madrid. En signant au sein de cette institution, le joueur retrouve la plus grande des compétitions européennes, la ligue des champions d’Europe. Pour sa première année, lui et ses coéquipiers sont éliminés en demi-finale face au CSP Limoges. Mais en Liga ACB, le club de la Casa Blanca écrase la concurrence et remporte le premier tour face à Girone, puis contre León, 2-0 à chaque fois. Ils gagnent la finale sur le score de 3 à 2 contre Joventut. L’intérieur madrilène achève deux rencontres avec une évaluation à 30 ou plus et obtient naturellement le titre de MVP des finales.

Lors de la saison suivante, le Real ne parvient pas à décrocher la coupe aux grandes oreilles. C’est une immense désillusion pour le natif de Kaunas, qui gagne tout de même le trophée de meilleur joueur du championnat. Pour se consoler, cette année 93-94, l’équipe réalise le back-to-back en dominant le championnat national. Il est le premier joueur à être nommé MVP des finales deux années de suite.

Pour sa troisième et dernière saison, le collectif dirigé par le légendaire Željko Obradović remporte enfin la ligue des champions d’Europe. Un soulagement qui le décide à traverser l’Atlantique.

Sabonis au Real Madrid

La NBA, une supériorité esthétique

À l’origine, le pivot est sélectionné par les Hawks d’Atlanta à la draft de 1985. Ce choix est annulé par la commission à cause de l’âge de Sabonis. En effet, l’intérieur lituanien n’avait pas encore 21 ans. Un an plus tard, il est pris en 24e position par les Trail Blazers de Portland. Bloqué par la politique de l’URSS puis par les blessures, Arvydas Sabonis arrive 7 ans plus tard dans la ligue nord-américaine. C’est donc après avoir dominé à tous les étages dans le basket FIBA qu’il pose un pied sur les parquets de la NBA. Malgré tout, l’intérieur a peur de ne pas être en mesure de suivre le rythme et de ne pas être suffisamment athlétique pour affronter les joueurs américains.

« En mon for intérieur, je ne me croyais pas capable de jouer à ce niveau. C’était un petit danger pour moi. Je pensais ça à l’époque, à tort ou à raison. Mais il faut dire que personne n’était venu m’en parler sérieusement, donc, quand quelqu’un d’Espagne est venu me chercher, j’y suis allé. »

C’est seulement en mars 1996 qu’il est introduit dans le cinq majeur des rouges et noirs. À ce moment-là, la franchise de l’Oregon est en passe de manquer les playoffs. Des histoires de drames entre certains joueurs et P.J. Carlesimo, le coach de l’équipe, éclatent au grand jour. L’escouade se redresse et parvient à accrocher une place parmi les 8 en gagnant 17 des 20 dernières rencontres. Le rookie de 30 ans conclut l’exercice 1995-96 avec une moyenne de 14,5 points à 55 % et 8,1 rebonds par match. Concernant le titre de meilleur rookie de l’année, Arvydas se classe 2e des votes derrière Damon Stoudamire. Pour les deux saisons suivantes, son équipe ne franchit pas le mur qu’incarne Shaquille O’Neal. Arvydas Sabonis est en grande difficulté face à l’intérieur des Lakers. Pour preuve, au premier tour des playoffs 1997, il affiche une moyenne de 4 points, 2 rebonds et 1 passe.

Photo : Andy Hayt/NBAE via Getty Images

Arvydas attend la saison 1998-99 pour enfin goûter aux demi-finales de Conférence. Après le premier tour remporté 3 à 0 face aux Suns, c’est le Jazz d’Utah qui se trouve sur la route des joueurs de l’Oregon. Les hommes de Mike Dunleavy Jr gagnent ce duel sur le score de 4 à 2. Malheureusement, c’est en finale que l’aventure s’arrête. L’équipe ne résiste pas à David Robinson et Tim Duncan. Les nouvelles Twins Towers terrassent les Blazers en 4 rencontres. Lors de ces finales de Conférence, Arvydas Sabonis affiche 10,0 points, 8,8 rebonds et 2,2 passes en 30,2 minutes de moyenne.

La saison 1999-2000 est sans doute sa dernière grande campagne en NBA. La venue de Scottie Pippen et de Detlef Schrempf place les Blazers parmi les favoris pour le titre NBA. L’équipe assume son statut en remportant 59 victoires pour 23 défaites. Arrivés en playoffs, les Trail Blazers passent avec brio le premier tour face aux Minnesota Timberwolves. C’est ensuite au tour des joueurs de l’Utah, qu’ils battent 4 à 1. En finales de Conférence, les Blazers affrontent leur ennemi juré, les Los Angeles Lakers. Malgré la mise en place du fameux Hack a-Shaq — tactique visant à commettre des fautes sur le joueur le moins habile aux lancers francs —, Portland ne résiste pas aux hommes de Phil Jackson. Ils perdent la série dans un Game 7 à Los Angeles. Arvydas Sabonis n’aura jamais été aussi prêt d’atteindre les finales NBA.

Auteur d’une grande carrière en Europe et aux États-Unis, Arvydas Sabonis a construit des ponts qui bénéficient aujourd’hui aux talentueux joueurs européens — notamment à son fils, Domantas Sabonis, qui évolue aux Indiana Pacers. Il est le digne héritier du jeu de son père, efficace, propre et gracieux. Arvydas est reconnu par la planète basket comme étant l’un des pivots les plus élégants de l’histoire. Ses passes dans le dos et ses relances à la manière d’un quaterback sont des éléments convaincants qui lui valent une comparaison à Larry Bird et Pete Maravich par l’ancien poste 5 des Blazers, Bill Walton. Le cinquantenaire est aujourd’hui le président de la fédération lituanienne. Son héritage, lui, perdure des deux côtés de l’Atlantique.

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